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La F.A.T.A.C.
Par Henri DEMARET, mise en page par Eric Van Heuverswyn
Les débuts de l’assistance technique belge dans le domaine aérien

Le 23 mai 1964, les autorités congolaises sollicitaient la Belgique de fournir les équipages et le personnel de maintenance pour le premier lot de matériel aérien envoyé par les Etas-Unis : six hélicoptères VERTOL (PLASECKI) H-21 B/C « Banane Volante » et dix bimoteurs de transport DOUGLAS C-47 B « Skytrain/Dakota » (1).

L’ordre général n° V.F. I/3085 du 9 juin 1964 stipulait (2) :

          a. que les envoies de troupes se faisaient au nom de l’aide technique ;
         
          b. que le gouvernement s’engageait à légiférer pour sauf garder, en faveur des intéressés et de leurs ayants droit, leurs acquis en Belgique ;

          c. qu’à défaut de volontaires, l’E.M. de la F.Aé.B. procéderait à des désignations d’office.

Le Détachement de la F.Aé.B. en République Démocratique du Congo se trouvait donc en mission commandée par le Gouvernement belge (3), ce qui excluait toute appartenance aux cadres de l’Assistance Technique Militaire Belge (A.T.M.B.).

Le carcan politique

Les conditions draconiennes pour l’envoi de personnel naviguant et technique de la F.Aé.B furent reprises dans une lettre du ministre des Affaires étrangères belge au Premier ministre congolais en date 17 septembre 1964 (4) :

          1. des missions à double but : assistance logistique (transport au profit des forces militaires congolaises) et missions humanitaires (évacuation des
              habitants menacés du Congo) ;

              « Ce détachement de la F.Aé.B ne pouvait effectuer que des missions de transport, d’évacuation et de reconnaissance à l’exclusion de toute
                   participation directe à des missions d’appui par le feu (bombardement, mitraillage, etc.…) » ;

          2. une assistance limitée dans le temps : le personnel devait effecteur des rotations de trois à six  mois ;

          3. la subordination du Détachement aux autorités belges : le personnel dépendait directement du Chef d’Etat-major de al Force Aérienne Belge, via
              un officier supérieur, le lieutenant-colonel aviateur Van Den Poel. Ce commandant du Détachement BAKA ne dépendait en aucune façon du Chef
              De l’Assistance Technique Militaire Belge, ni des autorités militaires congolaises (A.N.C.) !

              Celles-ci proposaient des missions qui seraient exécutées dans la mesure où elles correspondraient aux servitudes  imposées ci-dessus. Le Chef
              du détachement était donc seul habilité à donner aux équipages nationaux les ordres et les missions de vol. Il pouvait entreprendre, d’initiative, le
              sauvetage éventuel de ressortissants belges » (5)

Les conditions draconiennes précitées étaient en fait imposées par les autorités politiques civiles en raison de l’assistance militaire, controversée sur le plan international, de notre pays à l’ancienne colonie incapable de faire face, seule, à une rébellion grandissante.

Sur le terrain

La liaison nécessaire entre le dirigeant de la Force Aérienne Tactique Congolaise (F.A.T.A.C.) en opérations et la Commandant en Chef de l’A.N.C. fut réalisée grâce à la présence au Q.G./A.N.C. à Léopoldville d’un officier supérieur de la F.Aé.B, le lieutenant-colonel aviateur E. (« Toto ») Bouzin, membre de l’assistance militaire ordinaire.

Sur les quelques aérodromes encore tenus par l’A.N.C. durant cet été 1964, le personnel navigant du premier détachement de la F.Aé.B. comprenait six équipages de C-47 B et quatre pour les six hélicoptères (6). Cette unité totalisait cent vingt membres. Placée sous les ordres du lieutenant-colonel aviateur André Decock, elle fut à pied d’œuvre dès le 22 juin 1964. Il était temps : les premières évacuations en catastrophe débutaient…Le Détachement F.Aé.B./BAKA était envoyé, en principe, pour une période de trois mois (juin à août 1964) !

En cas de coup dur ‘crash de l’aéronef en zone rebelle), les équipages étaient dotés d’une arme personnelle (prescription envisagée pour le vol au-dessus de régions forestières ou désertiques) et d’un équipement de survie (poignard, réserve d’eau potable, boussole, rations de survie, trousse de secours, pistolet lance-fusée, …).

La composition des effectifs du deuxième détachement fut la suivante : cinq équipage de C-47, un équipage de DC-4 et quatre d’hélicoptères. Il fallait y ajouter les techniciens au sol et les instructeurs encadrant et formant les U.D.A. congolais (7). Au total, l’effectif comptait cent soixante membres.

A l’arrivée de chaque groupe de la Force Aérienne Belge, une déception de taille les attendait à BAKA, qui avait été un modèle du genre dans les dernières années de la colonie : avant de commencer les opérations aériennes proprement dites, il fallait tout aménager dans les cantonnements et les installations techniques.

L’ancienne base aéroterrestre des troupes métropolitaines dans le Nord Katanga se trouvait dans un état lamentable : « occupé après l’indépendance par les troupes suédoises de la F.N.U. et remis au printemps 1964 aux soldats de l’A.N.C., elle avait subi d’incroyables déprédations. Les occupants successifs avaient percé les toits pour allumer, en plein milieu des salons, les feux de camp où ils réchauffaient leurs gamelles. La piscine olympique servait de lavoir et tout était souillé ou brisé » (8) !

       (1) « Questions et Réponses », Sénat, session ordinaire, 1963-654, question n°44 de MM. Lahay, Vreven et Van Causteren du 19 mars 1964, p 1045.

       (2) Op. cit., question n°65 de M. Hougardy du 11 juin 1964, p 1112.

       (3) « Questions et Réponses », Chambre des Représentants, session ordinaire, 1964-65, question n°9 de M. Mattheyssens  du 1er décembre 1964,
                 p 171 ; question n°14 de m. Saintraint du 8 décembre 1964, p 173.

       (4) Annexe 4 de l’article « L »Assistance Technique Militaire Belge au Congo de 1960 à 1969 » (2ème partie) par le Major belge BEM Jacques Noël
                dans « Bulletin de Cavalerie », n° 235.

       (5) Colonel BEM e.r. Frédéric Vandewalle, « L’Ommegang. Odyssée et Reconquête de Stanleyville - 1964, publié à compte d’auteur, Bruxelles, 1970,
                p 214 (collection « Témoignage africain »).

       (6) op. cit., p 141.

       (7) X, « L’Assistance technique de la Force aérienne au Congo » dans « Nos Forces », bimensuel militaire belge, n° 130, 15 juillet 1965, p 15.

       (8) André Desauw, « De l’Etat indépendant du Congo au Zaïre en passant par le Congo belge et la République  Démocratique de Congo 1876-1982 »,
               édition du C.R.A.O.C.A., Bruxelles, 1984, p 420.

 
                                                                                   LES UNITES DE DEFENSE DE LA FATAC

Naissance de l’unité spéciale

En Belgique, toutes les bases aériennes opérationnelles font l’objet d’une protection assurée par des troupes spécialement entraînées et à la vocation mi-fantassins, mi-aviateurs : les U.D.A. ou les Unités de Défense des Aérodrome (1)

Il résulta qu’au Congo, le détachement de la FAéB comprit, outre, les équipages, les mécaniciens et le personnel nécessaire à desservir les bimoteurs DOUGLAS C-47B « Brouette », les quadrimoteurs DOUGLAS C-54 « Skymaster » et les hélicoptères VERTOL H-21 B/C « Banane Volante », une unité de combat spécifique.

Celle-ci était chargée, d’une part de la défense rapprochée du personnel navigant ou non navigant belge, et d’autre part de la protection des installations aéronautiques congolaises, réactivées par les techniciens étrangers.

« La première Escadrille d’Unités  de Défense de al FATAC fut constituée à BAKA, en août 1964, par le capitaine d’Aviation Auguste Servais. Elle comprenant trois pelotons opérationnels et un peloton en réserve encadrés par des sous-officiers belges de la FAéB (2).

Son arrivée en R.D.C. fut fortement appréciée. En effet, une alerte récente avait été chaude…Il faut se rappeler qu’au cours du mois de juillet 1964 ; les rebelles venus d’Albertville avaient successivement progressé vers Kabalo et Kabongo. En date du 28 juillet, la garnison de l’A.N.C. avait abandonnée cette dernière localité pour se replier sur Kamina !

La situation préoccupait les autorités consulaires : environ deux cents Européens vivaient dans la ville de Kamina, proche de BAKA. Dans cette base militaire, on comptait cent vingt Belges sous les ordres du lieutenant-colonel BEM aviateur André Decock. « Les messages de plus en plus alarmante de ce dernier avaient amené le lieutenant général aviateur J. Ceuppens, à Bruxelles, à envisager le principe d’une évacuation du détachement belge » (3), soit vers Kolwezi (Sud Katanga), soit vers Léopoldville.

Heureusement, une action de l’A.N.C. arrêtait, in extremis les rebelles à la Kilubi, centrale hydro-électrique distante de cent kilomètres de la Base. « Le lieutenant-colonel congolais Eustache Kakudji, à la tête d’une troupe formée de commandos venus du Kwilu, d’ex-gendarmes katangais et de fuyards A.N.C. rameutés, sauvait ainsi l’ancienne base aéroterrestre du Congo Belge » (4) de tout arrêt opérationnel et impensable de la FATAC !

          (1) L’appellation « U.D.A. » datant de 1953 disparut, à partir de 1966, au profit d’une autre expression : les U.P.I. ou Unités de Protection des
                Installations (équivalent des unités « Commandos de l’Air », en France)

          (2) Jean A. Mangin, Jacques P. Champagne, Marcel Van Den Rul, « Sous nos Ailes (L’Aviation Militaire Belge, son Histoire, ses Avions, ses
                 insignes) », Ed. C. Everling S.P.R.L., Arlon, 1977, p 81.

          (3) Colonel BEM e.r. Frédéric Vandewalle, « L’Ommegang. Odyssée et Reconquête de Stanleyville - 1964”, publié à compte d’auteur, Bruxelles,
                1970, pp 130-131.

          (4) Op. cit., p 143

En action

Cette première Escadrille fut engagée successivement à Kongolo, Kindu, Punia et Stanleyville, dès que la progression des colonnes mobiles « Lima 1 » et « Lima 2 » de l’A.N.C., chargées de la reconquête et de la pacification dans le nord et l’est du pays, devint une réalité.

Compte tenu de la situation précaire de certains groupes d’Européens isolés en zone rebelle, la double mission traditionnelle évoquée ci-dessus fut vite dépassée sur le terrain.

De véritables opérations humanitaires armées furent montées par les troupes au sol de la FATAC. Les Unités de Défense conquirent ainsi leurs titres de gloire en exécutant une cinquantaine de missions de sauvetage à Lodja (5) en septembre 1964, et aux environs de Kindu en septembre en octobre de cette même année.

Après la reprise de Stanleyville, les missions de transport, de ravitaillement ou d’évacuation sanitaire reprirent au profit des postes isolés ou des petites colonnes mobiles lancée aux trousses des dernières bandes de rebelles organisées dans le nord-est du pays.

Entre-temps, « un ventre de formation et d’instruction constitué également à BAKA fournit, en mai 1965, de quoi présenter une force appréciable : quatre escadrille opérationnelles, un escadron de reconnaissance, un peloton de mortiers et un peloton de police militaire. Les effectifs de cette nouvelle unité se montaient à un officier, neuf sous-officiers belges et quelques cinq cents gradés et soldats katangais.

Certaines particularités en faisaient une formation spéciale : le peloton de trente hommes était conçu pour être « aérotransportable » par C-47 (6) ; articulé en section de dix hommes, le peloton devenait ‘héliportable’ grâce aux « Banane Volante ».

Par escadrille, un peloton avait été spécialement entraîné aux missions ‘coup de poing’ menées par hélicoptères : sauvetage de blessés, d’otages (7), de lancement de tracts, de destruction de bases rebelles, etc.…

Ce type de missions particulières ne devait pas se poursuivre longtemps dans la mesure où les voilures tournantes furent rapidement mises hors de service, avant la fin du premier semestre de 1965.

Le rôle des Unités de Défense de la FATAC se termina à la fin de l’année 1966, à l’occasion du retour progressif des cadres belges.
« Un autre modèle, officiel et fourni par le Q.G./A.N.C. (9), porte le sigle « FATAC-UDA » (figure située à droite). Les couleurs écarlates et vertes sont celles du Katanga. Nous noterons qu(à l’origine, la croisette de cuivre katangaise était prévu en lieu et place de l’étoile do Congo car les gradés et soldats étaient d’anciens Gendarmes katangais. La croisette ne fut toutes fois pas maintenu afin de ne pas heurter les susceptibilités congolaises. Les insignes ont été fabriqués en feutrine brodée. » (10)

L’un des deux insignes était porté sur la manche gauche de la veste camouflée trois tons, à hauteur de l’épaule.
Troisième personne de gauche est Marc Carlier, la personne à droite c'est Berton le mercenaire qui était avec les UDA Belges
(5) cité dotée d’un aérodrome d’escale sur la ligne Luluabourg-Stanleyville, à 407 Km de Luluabourg et à 456 Km d’Ikela.

(6) Le poids des commandos équipés équivalait au chargement du bimoteur, toutefois, sur de courtes distances.

(7) Op. cit., collectif, « Sous nos Ailes », p 81.

(8) Op. cit., ibidem, p 206.
L’insigne de beret des U.D.A. de la FAéB
« L’attribut de béret des U.D.A. (en Belgique) est représenté par un insigne en métal doré pour les officiers, argentés pour les sous-officiers et bronzés pour les caporaux et soldats.

Il est porté sur le côté gauche du béret. La devise est « Invincibiles et Recti » ; « Invincibles et Droits » est à la mesure de l’unité de type commando » (11).
(9) Quartier Général/Armée Nationale Congolaise.

(10) Op. cit., collectif « Sous nos Ailes », p 206.

(11) Op. cit. ibidem, pp 188-189

(12) « Questions et Réponses », Sénat, session ordinaire, 1963-654, question n°44 de MM. Lahay, Vreven et Van Causteren  du 19 mars 1964, p 1045.

(13) Op. cit., question n°65 de M. Hougardy du 11 juin 1964, p 1112.

(14) « Questions et Réponses », Chambre des Représentants, session ordinaire, 1964-65, question n°9 de M. Mattheyssens  du 1er décembre 1964, p 171 ;
         question n°14 de m. Saintraint du 8 décembre 1964, p 173.

(15) Annexe 4 de l’article « L »Assistance Technique Militaire Belge au Congo de 1960 à 1969 » (2ème partie) par le Major belge BEM Jacques Noël dans «
        Bulletin de Cavalerie », n° 235.

(16) op. cit. ibidem, pp 188-189.
L’Insigne de béret des UDEF/FATAC ou FATAC/UDA comporte la devise « Pro Patria et honore » (« Pour la Patrie et l’Honneur »). Il a été réalisé en métal argenté.

Il faut noter qu’au début de l’entraînement, le personnel katangais portait un béret kaki sans insigne. A l’issue  d’une sélection sévère, le commando breveté recevait le béret gris-blue frappé de l’insigne des U.D.A de la Force Aérienne Belge.

L’emblème représenté ici fut introduit en mai 1965. Il représente un glaive ailé surmonté de l’étoile congolaise et supporté par un listel arborant la devise » (12)
L’Insigne de beret des U.D.A. de la FATAC
Fernand Hollanders avec l'insigne Udef Fatac sur le beret
© Eric Van Heuverswyn