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LE JOURNAL PERSONNEL DU CONGO
DU COMMANDANT AUGUST SERVAIS
Copie des documents personnels du Commandant August Servais
Mise en page par Eric Van Heuverswyn
Je cite :
INTRODUCTION
Dès le mois d’août 1960, les lieutenants A.Protin et A.Servais avaient posé leur candidature d’officiers à la Gd Kat, (pour toutes les abréviations, voir en fin de page). Devant les lenteurs administratives, ils quittèrent BaKa dans la nuit du 8 au 9 septembre pour Elisabethville, dans une voiture dont le compteur accusait plus de 100.000 Km et qui consommait presque autant d’huile que d’essence. Elle accomplit cependant les 900 Km sans autre incident qu’un pneu crevé.
André Protin séjourna quelque temps à E’ville puis nommé capitaine, il prit le commandement du Bn Gd Kat de Mitwaba d’où en février 1961, il se mit en route pour reprendre Manono et ses mines d’étain aux rebelles. Il y installa son EM de Bn.
Lors de l’arrestation et de l’expulsion des officiers et cadres belges par l’ONU, il se trouvait en permission en Belgique. Il rentra au Katanga pour y prendre part au 1er round contre l’ONU.
Ensuite, il fut forcé de rejoindre de pays, VS L’affecta à un cours de russe puis à VS2.
En 1964, quand revenu au pouvoir comme 1er Ministre, Tsjombé fit appel à la Belgique pour l’aider à reconquérir le pays sur les mulelistes. A.Protin, commissionné major de l’ANC, prit le commandement d’un bataillon qui au départ de Manono s’enfonça vers le Nord.
Après une série de succès, le bataillon dont Protin était à la tête, tomba dans une embuscade à Penne Lunonga. La colonne Papa (P pour Protin) s’arrêta…Les deux autres, Lima 1 (Liègeois) et Lima 2 (Lamouline) eurent plus de chance.
(Contrairement à vos informations, Protin n’était pas aux ordres de Lamouline mais commandait sa propre colonne. Par contre le récit de l’argent doublement volé est correcte.)
Pendant sa convalescence en Belgique, Protin réussit un examen qui en firent un officier d’active puis il rejoignit Léo où, sur ordre de Tsjombé, il débuta l’organisation d’un corps de Prévôté Militaire.
Après la chute de Tsjombé, Mobutu le fit expulser sous prétexte de complot. En Belgique, Protin réussit de l’examen de major. Nommé à ce grade, à VS3 Mob, il acquit un doctorat en droit à l’ULB. A sa retraite, devenu avocat il exerça quelques années avant de mourir dans son lit en 1985.
AUGUSTE SERVAIS rejoignit Kamina-Ville sans tarder pour y former le tout nouveau bataillon commandé par le Cdt Van Damme. Il rejoignit sa nouvelle garnison le 12 septembre pour en repartir le 13 à destination de Luena, important centre minier et ferroviaire terrorisé par des bandes rebelles. Commandée par Van Damme, la force d’intervention se composait d’un Pon de recrues armées le matin du départ, et de 2 Pons de PNK (Police Nationale Katangaise) aux ordres de Servais.
Des durs combats se déroulèrent les 13,14 et 15 septembre. Servais y récolta le grade de capitaine et deux blessures légères dont une au corps à corps.
A la tête d’une 1ère Cie fraîchement constituée de recrues pas entièrement instruites, Servais s’empara de Kabondo Dianda, nœud routier vers Kamina. Assurant les liaisons routières vers Luena, il le tint sans lâcher malgré de durs combats et un encerclement total. Il fallut sortir de cet encerclement pour relever la 1ère Cie réduite à deux Pons mais après un bref repos, cette unité retourna à Kabondo Dianda tenue par une unité provisoire. Blessé dans une embuscade de 1er novembre, après un bref congé en Belgique, Servais retrouva sa compagnie pour participer aux opérations de Kabongo et Bukama (entre Kabondo Dianda et Luena, centre fluvial).
Le 1er mai, Servais prit le commandement de la 1ère Cie de Prévôté Militaire (E’ville). Après des opérations de routine, le 31 août 1961, sur l’aérodrome de la Luano, les Irlandais de l’ONUC le capturèrent par traîtrise. Quelques jours de captivité à BaKa, trois tentatives d’évasion, il fut rapatrié en Belgique où il prit du service à l’EM Gr IE (directeur des cours militaires).
De cette unité, il partit en 1964 pour BaKa pour y former et commander l’UDef FATAC. A son retour, après quatre ans comme Comd Gr Base du W.Télé, il passa au Service Historique des forces armées. Il acquit une licence en histoire (ULB) et dirigea un moment ce service jusqu’à sa retraite le 1er avril 1980.
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Outre leurs DH belges, ces deux officiers sont porteurs de l’ "Ordre du Mérite" et de la Croix de Guerre du Katanga ainsi que de la médaille des Opérations humanitaires armées 1960-1965.
Pourquoi la FATAC
Après avoir, en 1962, réduit la sécession Katangaise par la Force (celle du Kasaï tomba en même temps), l’ONUC retira ses coûteux mercenaire. Le gouvernement de Léo laisse s’installer alors dans tout le pays une effroyable corruption, la famine et le désordre.
Au Katanga, un régime de terreur inconnu d’autres armées sauf peut-être de l’Armée Rouge.
Partout, les fonctionnaires civils, les militaires de l’ANC et les policiers, rarement payés et fort mal, se mirent à rencogner les populations et à les piller.
Ce climat devait largement favoriser la naissance de mouvements de résistance mais ils ne vinrent pas d’où on les attendait.
Les anciens amis et partisans de Patrice Lumumba, d’obédience communiste ou manipulés par Moscou ou Pékin se mirent à saper le régime en place. Je parle de Christophe Gbenye, Gaston Soumialot, Pierre Mulele et consorts tels le « général » Lundula, le boucher de Stanleyville.
Pierre Mulele, un ancien ministre de Lumumba avait reçu en Chine une formation très poussée à la guerre subversive. A son retour en Afrique, il se lança dans la création de maquis, de camps d’instruction pour ses « Simba ». Les armes lui venaient du Burundi et d’Uganda. Impossible de résumer en quelques paragraphes les différentes phases de la rébellion « muleliste ». On peut en situer le foyer principal dans le Kwilu-Kwango mais je crois en plusieurs mouvements différents coordonnés de l’extérieur.
On se souviendra des différances entre les diverses troupes rebelles dans la même région. Un noyau dur, bien armé de Kalachnikov AK47, de mitrailleuses lourdes et de mortiers, et, d’autre part des bandes de sauvages armés de lances, arcs et machettes, incapables de manier les armes prises à l’ANC.
L’arme principale des mulelistes : la superstition. Les sorciers faisaient absorber du chanvre indien à ces guerriers, souvent des adolescents, puis leur donnaient un « baptême » supposé les rendre invulnérables aux projectiles ; ceux-ci étaient censés se charger en gouttelettes d’eau en arrivant sur leurs cibles ; d’où le cri « Maï Mulele » (de l’eau de Mulele) lors des attaques. Nous avions connu le même cri au Katanga, quand les rebelles de la Balubakat nous attaquaient en hurlant « mema » ou « maï », de l’eau.
Si un des « baptisés » se faisait tuer ou blesser, le sorcier l’expliquait : il n’a pas cru en son « dawa » ou il a eu peur. La mort ou la blessure représentent la punition de son incrédulité.
Pire, les militaires de l’ANC croyaient en la vertu de cette médication, la « dawa ». Ils se disaient qu’il était inutile de combattre des ennemis ainsi protégés et ils prenaient allègrement la fuite en abandonnant familles, armes et bagages.
Dans ces conditions, le rébellion fit tache d’huile et en dépit des efforts de quelques troupes courageuses et surtout bien menées par des officiers congolais (ce fut rare), elle ne tarde pas à menacer tous le nord-est de la République.
Une constatation : les rebelles envahirent le Nord Katanga : ils s’emparèrent sans combat d’Albertville mais y assassinèrent Sendwe Jason, en 1960, le principal opposant de Tjombé, devenu en 1962 le gouverneur de la nouvelle province du Nord Katanga. Il tentait de s’opposer aux pillages…
La progression des rebelles s’arrêta d’elle-même à Kabongo (une dès anciennes garnisons de la Gendarmerie Katangaise).
Au-delà, et c’est pourquoi je le note, s’étendait le territoire du Mulopwe Kasengo Nyembo.
Pendant son exil forcé, Moïse Tsjombé avait cru à un soulèvement spontané des Katangais. Il n’en fut rien et je ne l’explique pas. Toujours est-il que, contrairement à toutes les hypothèses de travail des états-majors, le Katanga ne suivirent pas la rébellion.
- Ou bien les Katangais étaient-ils épuisés au point de plus combattre ? Possible.
- Ou bien Tsjombé leur avait-il promis autre chose ? Je ne le saurai jamais.
Toujours est-il que la rébellion s’arrêta devant les territoires de Kasengo Nyembo.
Au grand soulagement de la garnison de la FATAC de BaKa ! Les rebelles s’étaient arrêtes, à 80 kilomètres de Kamina, là même où en 1961, j’avais infligé une balle raclée de leurs prédécesseurs de la Balubakat.
L'insigne de l'ANC
L'insigne de l'UDef - FATaC
LE RETOUR DE TSJOMBE
En dépit de son flirt avec les rebelles et devant ‘impuissance de Cyrille Adoula, le président de la République, Joseph Kasavubu, fit appel à Moïse Tsjombé.
Dès le début de son mandat, Tsjombé rappela ses anciens ministres Katangais dont Godefroid Munongo qui reprit l’Intérieur. Ensuite, il tenta de rouer des contacts avec les rebelles.
Début juillet 1964, il effectua une visite à Stan. Un triomphe populaire mais quelques jours plus tard, de retour à Léo, il apprit que les rebelles avaient pris cette ville sans combat et que, sur leur progression, ils s’étaient emparés de Kindu.
Dès lors, ils menaçaient une nouvelle partie importante du territoire congolais.
Il ne lui restait qu’une seule solution déjà entamée par son prédécesseur, Cyrille Adoula : demander l’aide des Etats-Unis et de la Belgique.
A y tant que faire, il rappelle les anciens mercenaires du Katanga, dont la 5ième Commando de Mike Hoare, formé uniquement de Sud-Africains. Cette unité fut certainement la meilleure de toute la 5ième Brigade.
LA 5ième BRIGADE MECANISEE.
L’idée générale des chefs de la 5ième Brigade mécanisée était d’opposer aux rebelles une force tellement importante qu’ils ne pourraient que s’enfuir devant elle.
Son chef, le colonel BEM Van de Walle disposait d’une dizaine d’équipes ‘logistiques’ Belges. Ses Africains devenaient des « figurants » sans autre mission.
Son tableau organique prévoyait une « compagnie UDA » destinée à plus ou moins longue échéance à défendre les aérodromes conquis pendent la progression.
On verra le commandant de la FATAC étouffer cette idée d’annexion dans l’œuf et comment le cadre UDef Belge fit de ses soldats autre chose que des « figurants ».
LES MOYENS AERIENS.
Les Etats-Unis fournirent des véhicules (jeeps et camions Reo « rebuilts », rénovés) et surtout des avions : C-47, T-28 armés de mitrailleuses et de roquettes, bimoteurs « Intruder » (même armements) et C-46. Sauf les C-47, cette petite flottille était pilotée et entretenue par des « Cubains ». En réalité, il s’agissait de mercenaires recrutés et commandée par le CIA, le personnel technique se composait surtout de Britanniques.
Autre aide Américaine : le transport lourds et à grandes distances par les C-130 « Hercules » de le USAF ? Chaque appareil emportait sa propre section de défense rapproches.
Le FAC avec son état-major et sa base principale à Léo, possédait quelques vieux bimoteurs de liaison et peu de pilotes.
Il fallait faire appel à le F Aé pour constituer une Force aérienne tactique (FATAC) avec des équipages de C-47, pour les hélicoptères H-21 (les « bananes »), du personnel technique et administratif.
ABREVIATIONS
ANC Armée National Congolaise
BaKa Base de Kamina
Balubakat Baluba Katangais
Bn Bataillon
Cdt Commandant (grade)
Comd Commandant (fonction)
E’Ville Elisabethville
EM Etat Major
FAC Force Aérienne Congolaise
FATAC Force Aérienne Tactique de l’Armée Congolaise
Gd Gendarmerie
Gr Groupe
IE Instruction
Kat Katangaise
ONU Organisation des Nations Unis
PNK Police Nationale Katangaise
Pon Peloton
Stan Stanleyville
UDef Unité de défense
ULB Université Libre Bruxelles
VS Etat Major Général de la Force Aérienne
W.Télé Wing Télécommunications
© Eric Van Heuverswyn
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